Sonja Dünnebeil poursuit son patient labeur d’édition des registres de l’ordre de la Toison d’or conservés dans les archives de l’ordre à Vienne et offre aujourd’hui celle du quatrième, couvrant les années 1477 à 1480, préfacée par Werner Paravicini qui montre les apports de ce volume. Il s’agit d’années importantes dans l’histoire de l’ordre, qui devait faire face à un changement de dynastie, ce que présente Sonja Dünnebeil dans son introduction. Le duc Charles de Bourgogne est mort à Nancy, le 5 janvier 1477, en laissant une unique héritière, Marie en l’eaige de xx ans ou environ (elle était née le 13 février 1457). Conformément aux plans déjà tracés avant sa mort, Marie de Bourgogne fut mariée par procuration le 21 avril 1477 à Maximilien d’Autriche, fils de l’empereur Frédéric III et de l’infante Éléonore de Portugal, et en personne à Gand le 19 août

Une première assemblée de chevaliers et d’officiers eut lieu le 22 août; le lendemain, par la voix de Guillaume Fillastre, évêque de Tournai et chancelier de l’ordre, il fut demandé au nouveau duc de Bourgogne de relever l’ordre. Comme Maximilien ne connaissait pas le français, il lui fut accordé de faire faire une traduction des statuts en latin. Ce n’est que le 17 décembre, à Bruxelles, qu’il accepta la souveraineté de l’ordre et alors il s’occupa de la convocation d’une nouvelle fête. Celle-ci eut lieu à Bruges et commença le 30 avril, en présence de seulement cinq chevaliers (Jean seigneur de Lannoy, Adolphe de Clèves seigneur de Ravenstein, Louis de Bruges seigneur de Gruuthuse, Philippe de Croÿ comte de Chimay et Engelbert II comte de Nassau), le roi de Naples Ferrante d’Aragon et le vieux Jean de Melun seigneur d’Antoing ayant envoyé une procuration, sur les dix-huit survivants. D’autre part, bien que l’officier d’armes Namur ait tenté de leur porter les lettres, ceux qui avaient pris le parti de France (Philippe Pot seigneur de La Roche-Nolay, Philippe de Crèvecœur seigneur d’Esquerdes, Jean Damas seigneur de Clessy, Antoine Grand Bâtard de Bourgogne) ne les reçurent pas, sauf Jacques de Luxembourg seigneur de Richebourg.

La fête se déroula selon le protocole défini. Maximilien reçut le collier le 30 avril, le chancelier prononça une oratio1 , les chevaliers présents prêtèrent serment (en latin) au nouveau souverain que celui-ci reçut avec un baiser sur la bouche, puis les officiers (une embrassade pour le chancelier, un serrement de main pour les autres).

La fête elle-même commença le soir à la suite des vêpres, dans l’église Saint-Sauveur (où se trouvent toujours les blasons des chevaliers). Il fut question des chevaliers présents en France (on ne ferait pas l’offrande pour eux mais on attendrait leurs excuses). Le 1er mai, le matin eurent lieu la grandmesse puis les offrandes, le soir les vigiles des morts puis les corrections des frères présents (Engelbert de Nassau à cause de ses mœurs légères) et absents (ceux se trouvant en France étant ajournés). Puis le souverain proposa de nouveaux membres: son père l’empereur Frédéric III, son cousin Matthias roi de Hongrie, son oncle par alliance Albert de Saxe, ensuite le seigneur Bartholomäus de Liechtenstein-Karneid, puis les membres des familles soutiens de la dynastie bourguignonne: Philippe de Bourgogne seigneur de Beveren, Josse de Lalaing seigneur de Montignies, Pierre de Luxembourg comte de Saint-Pol, Hugues de Chalon seigneur de Châteauguyon (alors emprisonné en France). Le 2 mai, furent proposés d’autres nouveaux membres: Jacques de Luxembourg seigneur de Fiennes, Wolfart VI de Borselen comte de Grandpré et seigneur de Veere, Guillaume seigneur d’Egmond, et Jacques de Savoie seigneur de Romont mais on doutait de son acceptation. Ensuite fut célébrée la messe des Morts avec la commémoration des défunts, puis les nouveaux membres présents prêtèrent serment (il fallut régler un différend entre le seigneur de Gruuthuse et le comte de Romont). Enfin, une nouvelle fête fut prévue le 2 mai 1479 et les officiers furent confirmés dans leurs fonctions et Maximilien repartit faire la guerre aux Français, les chevaliers restants se réunirent le 4 mai pour régler les affaires de l’ordre et le 5 pour la messe du Saint-Esprit.

Différentes assemblées se tinrent entre 1478 et 1480, concernant les ambassades aux nouveaux membres, aux membres ayant pris le parti du roi de France. En mars 1479, on prévit une nouvelle fête à Bruxelles en mai suivant. Toute cette partie est intéressante pour les comptes rendus des missions des officiers d’armes et les correspondances entre officiers et frères de l’ordre et entre frères de l’ordre.

L’édition de ce quatrième volume par Sonja Dünnebeil est à recommander: les textes sont bien lus2, l’éditeur a donné tout l’apparat critique nécessaire: regestes, bibliographie, index. Un tel document est un témoignage irremplaçable et nous renseigne sur la vie d’un ordre de chevalerie dans tous ses »misteres«, avec la codification de tous les honneurs, gestes, et paroles, et au-delà sur la vie de cour de la fin du Moyen Âge.

2 Juste une petite correction: p. 43, Et equit(able?) est à lire et equipollement et est à rattacher à la phrase précédente avec la suite.

Zitationsempfehlung/Pour citer cet article:

Jacques Paviot, Rezension von/compte rendu de: Sonja Dünnebeil (Hg.), Die Protokollbücher des Ordens vom Goldenen Vlies. Teil 4. Der Übergang an das Haus Habsburg (1477 bis 1480), Frankfurt a.M., Bern, Bruxelles u. a. (Peter Lang Edition) 2016, 350 S. (Kieler Werkstücke. Reihe D: Beiträge zur europäischen Geschichte des späten Mittelalters, 17), ISBN 978-3-631-66678-4, EUR 64,95., in: Francia-Recensio 2017/4, Mittelalter – Moyen Âge (500–1500), DOI: https://doi.org/10.11588/frrec.2017.4.43274