L’ouvrage est composé de quatorze articles, en langue française et anglaise, distribués en cinq parties: l’»Introduction«, par les deux directeurs de publication, »Les artistes«, »La conception«, »Les supports spécifiques et les contextes« et, enfin, »Des artistes individuels et leur travail«.

L’article de Torsten Hiltmann, intitulé »Arms and Art in the Middle Ages. Approaching the Social and Cultural Impact of Heraldry by its Artisans and Artists«, est une riche synthèse annonçant la seconde introduction.

Laurent Hablot se penche sur »Art, esthétique et productions héraldiques au Moyen Âge. Considérations générales«. Les questions proprement artistiques ou esthétiques sont retenues sur des artistes héraldistes en réunissant plusieurs sources particulièrement éclairantes. Nous suggérons d’ajouter le précieux ouvrage de collation d’archives de Léon-Honoré Labande sur les primitifs français paru en 19321. Quant à l’intervention des hérauts, voir l’article du recenseur à ce sujet dans la »Revue française d’héraldique et de sigillographie«, où il est question de leur rôle dans la réalisation de plafonds peints2. Il convient de signaler également l’ouvrage didactique de Hiérosme de Bara à la fin du XVIe siècle, »Blason des armoiries«. Ces deux contributions de T. Hiltmann et de L. Hablot sont de belles introductions aux études qui suivent.

Dans la deuxième partie intitulée »The Artists«, Marc Gil pose la question de savoir si la »peinture d’armoiries est une activité parmi d’autres du peintre médiéval«. Retenons en priorité l’importance du peintre-verrier, déjà soulignée par Michel Pastoureau à propos de l’armorial Grünenberg; le terme de »miroullier« est particulièrement suggestif (le recenseur a localisé en la ville d’Avignon, l’emplacement du lieu d’activité de peintres et de peintres-verriers, dont une des rues porte le vocable de la Miraillerie, voir son étude citée sur les hérauts d’armes).

L’article de Matteo Ferrari est intitulé »Au service de la Commune. Identité et culture des peintres héraldistes dans les villes italiennes aux XIIIe–XIVe siècles«. Pour le rôle éventuel de livres de modèles et d’armoriaux, à propos de la salle communale de San Gimignano, il est opportun de signaler l’intervention d’un héraut d’armes, qui devait accompagner Charles II d’Anjou, vu l’enjeu politique, lors de son couronnement à Naples; quant à l’usage d’un armorial pour un décor monumental, il a été relevé dans le château de Châtillon-sur-Indre3.

Pour la contribution de Luisa Gentile intitulée »Artistes, hérauts et héraldique de part et d’autre des Alpes occidentales«, soulignons en priorité la problématique du héraut. Dès le XIIIe siècle, en le royaume de France, l’intervention d’un héraut est vraisemblable dans la réalisation de plusieurs décors monumentaux. Au XIVe siècle, l’intervention d’un héraut dans la création d’un décor héraldique complexe, en la salle de justice royale à Pont-Saint-Esprit, est associée au même phénomène relevé à San Gimignano. En effet, un héraut devait accompagner Philippe VI, alors de passage en la ville, sur le chemin d’Avignon, où également un acte politique majeur devait se traiter: l’attribution définitive du royaume de Navarre à l’épouse de Philippe d’Évreux4. Il en est sans doute de même dans les pays où le pouvoir est essentiellement vertical, l’Empire ou le Portugal, par exemple. En revanche, les hérauts en Italie, où le pouvoir est davantage »horizontal«, sont rares et tardifs. Le héraut est, en quelque sorte, le fruit et le révélateur de la structure de la société.

Olivier Fearon ouvre la section »Conception« par »›As Yt Ys Made‹. Gender and Description in Plans for Armorial Displays by the English Gentry c. 1460–1500«. À propos du rôle des femmes, de l’épouse, ne négligeons pas le mouvement général qu’illustrent, en particulier, à cette époque, l’apparition des preuses ou la position valorisante de la femme dans la représentation d’un couple, à dextre5. Quant au soin apporté à la présence de la femme dans le couple en nombre d’œuvres d’art en l’Europe des Anjou, voir l’article du recenseur consacré à ce sujet dans la »Revue française d’héraldique et de sigillographie«6.

Dans »The influence of Beneficiaries on the Artistic Make-up of Imperial Grants of Arms, or: How Do Heraldic Images Get into Late Medieval Charters?« de Andreas H. Zajic, la question essentielle, soutenue par de riches exemples, est le rapport entre le texte – le blasonnement – et l’image héraldique dans la concession d’armes.

Le premier article de la section »Specific Supports and Contexts« est rédigé par Martin Roland et traite de »Medieval Grants of Arms and their Illuminators«. Il s’agit ici de la même problématique, c’est-à-dire du rapport entre le texte et l’image. Cette contribution est un riche complément à l’article précédent.

La contribution de Steen Clemmensen est intitulée »Armorials as Commercial Ventures? Quelques observations«. Une précision, le héraut Berry dépose son armorial, pour consultation, à Saint-Antoine le Petit, la raison étant sans doute qu’à proximité se tenaient des joutes – une fameuse en 1389 lors de l’entrée d’Isabelle de Bavière. Dans cet armorial, l’intention politique est majeure et consiste à représenter l’ensemble du royaume de France autour du roi Charles VII – d’où la présence des armes des anciens territoires – et à différencier les soutiens dans sa victoire pacifique. Dans l’armorial Bourbon, il s’agit de la mise en images d’une enquête. Quant aux armoriaux des princes de Rügen et à ceux de Grünenberg, il s’agit de compilations avec des »mises au point« des auteurs suivant leur interprétation de la situation politique.

Radu Lupescu complète dans »Heraldic Commissions in an Architectural Context. Case Studies from Transylvania« par de riches exemples, les observations de l’étude sur l’Europe des Anjou7, dans laquelle la Hongrie a joué le rôle de maillon de transmission.

Anne-Sophie Bessero-Lagarde différencie dans »Les auteurs des pompes funèbres héraldiques à la Renaissance. Artistes de renom, associations de peintres et ateliers spécialisés« les praticiens des peintres renommés attachés à la cour et souligne l’importance des contrats d’association, qui permettent de répondre rapidement à des commandes, et la spécialisation d’ateliers dans la peinture d’armoiries.

C’est Tanja Jones qui ouvre par son article »Vivified Heraldry on Pisanello Medallic Imagery« la section »Individual Artists and their Work«. Nous retenons de ce bel article, en particulier, la problématique du rapport entre l’individu et le groupe, de sa position dans le groupe, famille, politique, qui se reflètent, suivant und étude du recenseur en cours de publications dans la »Revue française d’héraldique et de sigillographie«, dans l’iconographie des médailles.

Alessandro Savorelli présente dans sa contribution intitulée »L’héraldique des Della Robbia à Florence entre abstraction et naturalisme«, comme à l’accoutumée, avec finesse, l’évolution vers un naturalisme, notamment dans la représentation héraldique du lion qui représente un mouvement général, souvent relevé par le recenseur dans ses publications.

Le dernier article, rédigé par Jean-Christophe Blanchard, traite de »Georges Gresset peintre et héraut d’armes des ducs de Lorraine (1523–1569)«. Relevons, à l’issue de cette riche contribution, les écus attribués à Claude Crocq et à Médard Chupin, deux peintres à la cour aux côtés de Georges Gresset, lors de leur anoblissement. Ils offrent d’étroites ressemblances avec les armoiries des peintres-verriers toulousains qui prétendent avoir le droit d’utiliser, grâce à une autorisation royale, un écu »d’azur à trois écussons d’argent«8 – l’argent évoquant sans doute le verre, le miroullier (voir supra Marc Gil) et la rue de la Miraillerie d’Avignon –, ici complétées ou brisées d’une fasce ou d’un chef d’or.

1 Léon-Honoré Labande, Les primitifs français. Peintres et peintre-verriers de la Provence occidentale, Marseille 1932.
2 Christian de Mérindol, À propos d’une activité méconnue des hérauts d’armes, dans: Revue française d’héraldique et de sigillographie 83–85 (2013–2015), p. 19–34.
3 Id., Images du royaume de France au Moyen Âge. Décors monumentaux peints et armories. Art et histoire, Pont-Saint-Esprit 2013, respectivement p. 35, 30–31.
4 Voir l’ouvrage cité du recenseur cité n. 3, p. 76–83, ici p. 76.
5 Voir à ce sujet les contributions au colloque tenu à Mâcon en 1999 sur l’œuvre de Georges Duby: Annie Bleton-Ruget, Marcel Pacaut, Michelle Rubellin (dir.), Regards croisés sur l’œuvre de Georges Duby. Femmes et féodalité, Lyon 2000.
6 Voir Christian de Mérindol, La référence capétienne dans l’Europe des Anjou (XIIe–XVe siècle), dans: Revue française d’héraldique et de sigillographie 80–82 (2010–2012), p. 49–68.
7 Ibid.
8 Mérindol, À propos d’une activité méconnue des hérauts d’armes (voir n. 2).

Zitationsempfehlung/Pour citer cet article:

de Mérindol Christian, Rezension von/compte rendu de: Torsten Hiltmann, Laurent Hablot (ed.), Heraldic Artists and Painters in the Middle Ages and Early Modern Times, Ostfildern (Jan Thorbecke Verlag) 2018, 236 p., num. fig. (Heraldic Studies, 1), ISBN 978-3-7995-1253-4, EUR 45,00., in: Francia-Recensio 2018/3, Mittelalter – Moyen Âge (500–1500), DOI: https://doi.org/10.11588/frrec.2018.3.51763