Spécialiste, entre autres, de l’histoire de la France moderne et de ses relations avec le Saint-Empire, Klaus Malettke, professeur émérite de l’université de Marburg, docteur honoris causa de la Sorbonne depuis 1996, publie une biographie de Henri IV, après celles qu’il a consacrées à Colbert (1977) et à Richelieu (2018). Ce petit livre, qui, à travers la destinée improbable du premier Bourbon, retrace l’histoire de la France pendant les premières guerres de Religion, offre une synthèse des nombreux travaux qui ont été publiés sur cette période, non seulement en France (Roland Mousnier en 1964, Jean-Pierre Babelon en 1982, Janine Garrisson en 1984, François Bayrou en 1998) mais aussi en Angleterre (David Buisseret en 1982, Mark Greengrass en 1998) et en Allemagne (Ernst Hinrichs en 1994, Friedrich Beiderbeck en 2003), ouvrages qu’il met ainsi à la portée des chercheurs germanophones. L’exposé est étayé par des citations bien choisies, traduites en allemand si nécessaire.
Après trois chapitres introductifs qui dressent un tableau de la France et du royaume de Navarre au milieu du XVIe siècle, l’ouvrage est divisé en deux parties de taille sensiblement égale: la vie de Henri de Bourbon avant son avènement (1553–1589) puis l’histoire du règne (1589–1610). L’auteur embrasse tous les champs de la recherche (histoire politique, religieuse, économique), avec un grand sens pédagogique qui traduit l’attention qu’il porte aux jeunes chercheurs. Par exemple, traitant des questions économiques et financières dans le chapitre IX, il résume les données de base qu’il faut connaître en matière monétaire (p. 179–180).
Le cas échéant, il fait le point des débats historiographiques et compare les différentes hypothèses auxquelles ont donné lieu des événements importants, comme le massacre de la Saint-Barthélemy (étudié notamment par Jean-Louis Bourgeon en 1995 et Arlette Jouanna en 2007). L’abjuration du roi et son absolution par le pape, ses deux mariages et la déclaration de nullité du premier, sa vie privée, les conjurations (notamment celle du maréchal de Biron, seul conspirateur exécuté pendant le règne), les enjeux européens de la crise internationale de 1609, sont clairement exposés. Il en est de même pour l’édit de Nantes, qui reprend en grande partie les dispositions des édits de pacification antérieurs et marque l’aboutissement d’un projet politique mis en œuvre de longue date.
Le futur Henri IV en effet, dès sa fuite de la cour de France en 1576, avait su faire cohabiter dans son entourage proche à la cour de Nérac catholiques et protestants. L’édit de 1598 permettait à l’ensemble des Français de »coexister dans l’intolérance« (Michel Grandjean et Bernard Roussel, 1998), tandis que le roi entreprenait la reconstruction de son royaume meurtri en faisant siéger côte à côte dans son gouvernement le huguenot Sully, tout-puissant surintendant des finances, et des catholiques dévots. L’auteur montre bien dans sa conclusion que le premier Bourbon a été avant tout un réaliste, un pragmatique qui a su s’adapter à des situations complexes et les résoudre.
Zitationsempfehlung/Pour citer cet article:
Bernard Barbiche, Rezension von/compte rendu de: Klaus Malettke (ed.), Heinrich IV. Königsherrschaft, Konfessions-und Bürgerkriege. Der erste Bourbone auf dem Thron Frankreichs (1553–1610), Gleichen, Zürich (Muster-Schmidt Verlag) 2019, 220 S., 9 s/w Abb. u. Kt. (Persönlichkeit und Geschichte, 172/173), ISBN 978-37881-0172-5, EUR 18,00., in: Francia-Recensio 2020/3, Frühe Neuzeit – Revolution – Empire (1500–1815), DOI: https://doi.org/10.11588/frrec.2020.3.75779